jeudi 18 avril 2013

Hoai Huong Nguyen : "L'ombre douce" (Vietnam)

***** Réf. géographique : France / Vietnam
Un roman intéressant, chargé de poésie, sur une page terrible de l'histoire : la bataille de Diên Biên Phu en 1954.
Des mots simples pour une écriture délicate, qui parvient à décrire des scènes si dures et des sentiments puissants.

Le roman commence par la rencontre du lecteur avec le jeune Yann, enfant orphelin de mère, ballotté de parent en parent à Belle-Île dans la Bretagne d'après la 2e guerre mondiale. Jeune adulte, Yann s'enrôle pour l'Indochine.
Mai est une jeune annamite douce et rêveuse, orpheline de mère également, infirmière bénévole à l'hôpital français à Hanoi après ses années de couvent. Elle grandit aux côtés de son père, un juge important qui ne prête guère d’attention à sa fille sauf quand il décide que faire un grand mariage conforterait son statut social et d'unir la jeune Mai à un riche (et âgé) entrepreneur chinois.
Mais entretemps les regards de Mai et Yann se sont croisés à l’hôpital, le sentiment amoureux s’est développé au fil des jours. Mai a même fait usage de ruse pour garder Yann plus longtemps auprès d’elle et retarder son retour sur le champ de bataille.
La jeune fille affronte parallèlement un autre combat : elle puise dans ses forces pour s’opposer seule à son père et au mariage arrangé, et se trouve bannie dans l’heure par sa famille. Elle trouve refuge auprès du couvent, et se marie avec Yann. Celui-ci, jugé apte à batailler à nouveau, va vivre l'encerclement de la cuvette de Diên Biên Phu, sera fait prisonnier, traîné dans la jungle avec les survivants du camp français qui meurent d'épuisement ou de maladie jour après jour.
Mai va remuer ciel et terre pour obtenir des nouvelles de son époux, ce seront plutôt enfer et terre pour elle, qui sacrifiera sa personne pour sauver Yann. Mais ces deux-là ne pouvaient que vivre ensemble, ils étaient liés par l'amour. Yann ne pourra survivre à Mai., même rentré en Bretagne, voire encore moins... et la fin est bien triste.
Bien que le sujet soit si difficile, j'ai trouvé que l'auteur le dépeignait avec justesse et maîtrise, et parvenait à nous immerger dans l'atrocité de l'Histoire et nous impliquait dans le récit. Pour ma part, c'était un peu mon premier récit "concret" sur Diên Biên Phu... Mes souvenirs de cette page d'histoire relevaient des cours de sciences politiques et mettaient l'emphase sur les accords de Genève de juillet 1954, la politique de Mendès-France...

En conclusion, un court roman, bien écrit, mais que je n'ai toutefois pas trouvé bouleversant ou exceptionnel. Je crains que ce récit ne s'évapore rapidement de mes souvenirs de lecture.
(Editions Viviane Hamy, 2013, 155 p.)
 
Extrait / Diên Biên Phu : 
"Depuis l’automne, la cuvette de Diên Biên Phu était soumise à un mouvement continuel, à l’activité d’une fourmilière qui avait rongé les champs et les bois sur plusieurs kms à la ronde. La pluie blanche de corolles avait été suivie d’un ballet d’avions et d’hommes .C’était un bruit perpétuel d’air et de métal, de bulldozers et d’arbres coupés ; ils avaient aplani, creusé, comblé la terre, ils aménageaient des champs de barbelés et de mines. Les collines s’étaient transformées en un chantier d’abris précaires. Le camp retranché des Français devait être protégé par ces défenses et par deux pistes d’aviation qui le reliaient à Hanoi. Mais à mesure qu’avançait la saison, la fourmilière de Diên Biên Phu était peu à peu encerclée par des dizaines d’autres fourmilières cachées dans les montagnes ; elles avançaient secrètement sous la terre et à travers les reliefs pour se masser autour du camp français. Ce serait un combat d’insectes dans la boue, de fourmis noires contre des fourmis rouges, il en aurait toute la furie." (p90)

"(…) s’il est vrai que chaque homme se remplit un peu des livres qu’il lit (…)" (p20)

--> voir ma rubrique Livres d'Asie et mon répertoire Lectures d'Asie et Océanie
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...